Un savon voyageur…

Il y a quelques semaines j’ai reçu un cadeau qui réclamait d’être partagé avec la communauté des amoureux du savon. N’ayant pas de lieu où publier un article, je remercie Laurent de m’avoir proposé son blog pour cette contribution ponctuelle.

Préambule : je n’ai pas fait analyser d’échantillon de ce savon, préférant laisser jouer mon imagination et conserver une part de mystère à la chose. L’idée d’un « jeu de piste » basé sur de minces indices me paraît bien plus excitante et j’espère que vous aurez plaisir à les découvrir et extrapoler avec moi !

Savon recto Savon verso

Selon le vendeur de bric à brac dans lequel il a été chiné, ce serait un rescapé des stocks des premiers savons fabriqués par les pionniers arrivés aux USA. Certes rien ne le prouve mais son look, sa découpe et son aspect en général racontent déjà plein de choses… Et il n’est pas impossible que ce soit vrai.

Sa découpe

Très irrégulière, elle a été faite à main levée, avec un outil tranchant quelconque. Ce savon a une forme approximative de cube et pèse 333g.

Son odeur

Neutre et typique du savon. Il n’y aurait pas eu d’ajout de substance parfumante lors de la fabrication.

Sa texture

Très granuleuse, elle est solide, bien dure (après plusieurs décennies de séchage, l’inverse eut été surprenant !) et irrégulière. Les différences de couleurs montrent qu’il y a eut au choix :

  • un assemblage de graisses peu homogènes
  •  un filtrage des graisses rapide et peu performant

et que la lessive caustique a été également peu filtrée, la coloration brune pouvant provenir de résidus de charbon.

Les graisses alors disponibles sont – toujours sur le postulat d’un « savon des pionniers » – issues d’animaux. Le procédé de saponification peut être un procédé à chaud sans relargage – et donc sans excès de soude – ou un procédé de saponification à froid. Le revendeur penche pour le second et imagine un séchage sur claies, dans une grange probablement ou sur les rayonnages des chariots lors des traversées qui demandaient quelques bonnes semaines avant d’arriver à destination. Son usage devait être polyvalent : lessive (des vêtements) mais aussi savon de toilette « rustique », et d’autres usages de dépannage comme l’imperméabilisation des toiles (à l’image de ce qui se faisait au Moyen Âge avec les savons de voyage au saindoux).

Je vais ici faire hurler les puristes car oui, je l’ai fait un peu mousser (promis, une seule fois qui sera d’ailleurs la dernière). Là encore, le savon « parle » et délivre quelques indices pour continuer le voyage.

 

Mains avec de la mousse

Sa mousse, sa crème

La mousse est peu abondante, crémeuse avec quelques discrètes et toutes petites bulles.

Son odeur (bis)

Sous l’eau, elle est absente ou au moins si fine que presque indétectable. Et après rinçage, les mains ne donnent pas plus d’indices… Cart il ne reste rien non plus.

Son pouvoir lavant/décapant

Sans être asséchant, ce savon est clairement doté d’un pouvoir décapant. Il nettoie bien et ferait un excellent savon de lessive. Au quotidien, ma peau (sensible, j’avoue) supporterait mal des lavages de main répétés et encore moins une douche.

Son pouvoir hydratant

En toute logique, il est peu évident. Il ne laisse aucun résidu en surface, la peau crisse quand on glisse ses doigts les uns contre les autres. Quelques minutes plus tard, la peau ne tirait pas comme elle peut parfois le faire avec un vrai Marseille.

Sa vitesse de fonte

Ici c’est un estimatif qui mériterait d’être affiné mais a priori, elle serait très lente. Un simple passage sous l’eau, une caresse sur chaque face et hop ! On a largement de quoi se laver les mains, poignets compris.

Et oui, ce fragment du passé sera désormais laissé en l’état. Il est visible dans les locaux de la Savonnerie Minervoise et il en reste quelques morceaux au vendeur (avis aux collectionneurs !), dont j’ai les coordonnées quelque part (je reviens éditer l’article dès que je les exhume).

Je remercie du fond du cœur la personne qui s’est trimballé ce morceau de savon durant son road trip cet été et qui connaissait sa valeur à mes yeux, au point de lui faire traverser un océan pour me rejoindre.

Annabelle

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